Quelle Afrique demain ? Et quelle Afrique – France demain ? A cause du COVID-19, le sommet Afrique-France a été reporté. Nous avons là une immense opportunité pour « réinventer » une relation France - Afrique Demain dont le bilan à l'horizon 2050 pourrait donner lieu à une certaine fierté des deux côtés de la méditerranée. A travers cette analyse un peu longue, nous partageons quelques pistes pour l’atteinte de cette ambition.

Pour un engagement politique fort : Il y a urgence

Le Président français Emmanuel MACRON présentera dans les prochains jours sa stratégie pour l’après COVID-19. Nous espérons vivement que ce sera l’occasion pour le Chef de l’Etat de poser les bases d’une nouvelle collaboration France Afrique Demain orientée vers une diplomatie économique axée sur l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD). Lors de son discours de novembre 2017 à Ouagadougou au Burkina Faso, le Président MACRON a affirmé « Je souhaite que les entreprises françaises soient porteuses d'un partenariat exemplaire, un partenariat exemplaire qui refuse la corruption, qui se plie aux appels d'offres, qui se plie aux règles édictées par les institutions africaines qui comme l'OHADA font progresser la bonne gouvernance. »

Afin de matérialiser les engagements présidentiels pris en Afrique, les Ministres de l’Europe et des Affaires Etrangères et de l’Economie et des Finances, ont confié une mission à l’ancien Ministre Hervé GAYMARD. En avril 2019, ce dernier a rendu le rapport intitulé Relancer la présence économique française en Afrique : L’urgence d’une ambition collective à long terme . Dans ce document très intéressant de 239 pages, le message principal à retenir pour l’auteur est le suivant  « Les relations franco-africaines de 2050 se construisent aujourd'hui. La France doit se donner une ambition à long terme. Soixante ans après les indépendances, j'ai la conviction que nous devons dépasser la conception classique de l'aide pour construire celle de l'investissement pour le développement. »

Après la crise sanitaire et les nombreuses manifestations pour respirer à travers la planète, les propos de l’ancien Ministre Hervé GAYMARD prennent un écho particulier notamment au regard des chocs socio-économiques à venir sur les deux rives de la méditerranée et qui risquent d’accélérer une crise migratoire d’une ampleur difficile à prévoir.

Nous devons donc très urgemment promouvoir en même temps une nouvelle Diplomatie sanitaire, revoir le logiciel de la Diplomatie Economique en s’appuyant notamment sur la diaspora africaine, prendre en compte la Diplomatie écologique, miser énormément sur la Diplomatie sociale et impulser la Diplomatie féministe pour une mondialisation inclusive et durable des deux côtés de la Méditerranée.

Le Président Emmanuel MACRON n’a-t-il pas affirmé qu’il fallait se réinventer ? Ne confinons pas cette réinvention dans l’Hexagone car comme l’affirme l’économiste Carlos LOPES dans une interview au journal Le Monde « Il n’y aura pas de meilleure moment pour accélérer le changement en Afrique. Le choc actuel doit être le prélude à de profondes transformations sur le continent. »

Impacts du COVID-19 en Afrique

Après une bonne gestion de la crise sanitaire, le principal défi pour l’Afrique est à venir. Selon la Banque Mondiale, l’Afrique Subsaharienne devrait connaître sa première récession depuis 25 ans. Selon son Président David MALPASS, dans un communiqué daté du 2 juin, « L’ampleur et la vitesse avec lesquelles la pandémie de COVID-19 et la mise à l’arrêt de l’activité économique ont frappé les populations pauvres dans le monde entier sont sans précédent dans les temps modernes. Selon les estimations actuelles, 60 millions de personnes risquent de basculer dans l’extrême pauvreté en 2020. Et ce chiffre pourrait encore grimper, en fonction de l’évolution d’une situation qui dépendra principalement de la réouverture des économies avancées. »

En effet, le grand confinement a touché directement quelques piliers de la croissance économique à savoir le tourisme et l’exportation des matières premières. Sans oublier l’indispensable transfert d’argent de la diaspora africaine. D’après la Banque Mondiale, les transferts de fonds vers le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord devraient chuter de 19,6 % en 2020, pour atteindre 47 milliards de dollars, après la hausse de 2,6 % enregistrée en 2019. Les envois de fonds vers l’Afrique Subsaharienne ont connu un léger repli de 0,5 % en 2019, à 48 milliards de dollars. En raison de la crise du coronavirus, ce déclin devrait être nettement plus marqué en 2020, à 23,1 %, pour atteindre 37 milliards de dollars.

Face à tous ces constats, Carlos LOPES qui est également l’ancien Secrétaire Exécutif de la Commission Economique pour l’Afrique des Nations Unies (CEA) évoque une « situation potentiellement explosive » en Afrique tout en rappelant les 20 élections, avec les risques de tension, prévues avant la fin de cette année sur le continent.

Une note diplomatique, qui avait beaucoup de bruit, au titre évocateur ? « L’effet pangolin » : la tempête qui vient en Afrique ? publiée le 24 mars par le Centre d’Analyse de Prévention et de Stratégie du Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères évoquait une crise de trop (COVID-19) qui déstabilise durablement, voire mette à bas des régimes fragiles (Sahel) ou en bout de course (Afrique Centrale).

La Banque Mondiale estimait en avril que les pertes de production en Afrique Subsaharienne à cause du COVID-19 se chiffre entre 37 et 79 milliards de dollars en 2020.  

Bien évidemment, personne ne souhaite une situation catastrophique en Afrique, mais les alertes sont suffisamment graves pour qu’on pose urgemment les bases solides d’une nouvelle relation Afrique – France orientée vers l’atteinte des Objectifs de Développement Durable.

Voici nos 6 propositions.

1 : Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF) par filiale

La Directive 2014/95/UE exige aux entreprises européennes de plus de 500 salariés d’inclure dans « le rapport de gestion une déclaration non financière comprenant des informations, dans la mesure nécessaire à la compréhension de l'évolution des affaires, des performances, de la situation de l'entreprise et des incidences de son activité, relatives au moins aux questions environnementales, aux questions sociales et de personnel, de respect des droits de l'homme et de lutte contre la corruption. »

Il est également préciser dans l’un des articles de cette Directive, qu’ « une entreprise qui est une filiale est exemptée de l'obligation énoncée au paragraphe 1 si cette entreprise et ses filiales sont comprises dans le rapport consolidé de gestion ou le rapport distinct d'une autre entreprise. »

Or, nous avons parcouru plusieurs DPEF des entreprises du CAC 40 et du SBF 120 très présentes en Afrique. Difficile d’avoir une idée de l’impact de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) en Afrique en dehors de quelques aspects financiers ou sociaux (nombre de salariés, etc.) des activités africaines développés par certains groupes. Il nous semble donc judicieux que chaque filiale d’entreprise française en Afrique publie sa DPEF. Il faudrait pour cela que le Décret français n° 2017-1265 de transposition de la Directive Européenne soit amendé.

Nous avons noté ces dernières années, une mobilisation particulière des filiales des entreprises françaises en Afrique pour la conformité à la Loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

Si elles le sont, c’est bien parce qu’à l’Article 17, il est précisé « Lorsque la société établit des comptes consolidés, les obligations définies au présent article portent sur la société elle-même ainsi que sur l’ensemble de ses filiales. » 

Il suffirait donc simplement de préciser cette mention pour le Décret n° 2017-1265.

Cette initiative française pourrait également avoir un écho à Bruxelles. La Commission Européenne a clôturé en février les consultations relatives à la révision de la Directive sur la communication d’informations non financières dans l’optique de la révision cette année de la stratégie européenne sur la finance durable dont les consultations se tiennent jusqu’au 15 juillet.

L’exigence de DPEF pour les filiales françaises et leurs chaînes d’approvisionnement consolidera aussi les dynamiques d’exigence de reporting RSE de l’autre côté de la Méditerranée.

L’Arrêté du Ministre Marocain de l’Economie et des Finances n° 01704-19 du 30 mai 2019 a homologué la Circulaire de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux n°03/19 relative aux opérations et informations financières. Les entreprises marocaines faisant appel à l’épargne publique ont désormais l’obligation de publier un rapport financier annuel incluant un rapport ESG (Environnement, Social et Gouvernance). Les entreprises marocaines soumises à cette réglementation viennent de publier les premiers rapports RSE.

De son côté l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) a adopté en 2017 des obligations en matière de RSE (voir ci-dessous).

2 : Féminisation, l’exemplarité des entreprises françaises en Afrique et dans le monde

A Ouagadougou, le Chef de l’Etat français a rappelé « C’est une conviction profonde qui m’a poussé à faire de l’égalité femmes/hommes la grande cause de mon mandat, en France d’abord, où nous avons encore d’énormes progrès à accomplir pour assurer une égalité réelle dans notre société, et c’est une cause que je porte aussi dans mon action internationale ».

Sur les 180 Ambassadeurs français en poste dans le monde, il y a seulement 46 Ambassadrices dont à peine 9 en Afrique.

Grâce à la Loi Copé-Zimmermann de 2011 sur l’obligation d’avoir des quotas d’au moins 40 % des femmes dans les Conseils d’Administration, la France est citée en exemple pour la féminisation des CA. Depuis le 1er mars, les entreprises françaises d’au moins 50 salariés ont l’obligation de calculer et publier sur leur site internet leur index de l’égalité femmes – hommes.

Il faudrait exiger aux filiales de respecter également cette législation y compris celle à venir sur la promotion de l’égalité femme – homme qui envisage l’instauration des quotas de femmes dans les Comités Exécutifs.

Pour favoriser la féminisation des directions générales des filiales, on peut aussi inscrire dans la loi qu’au plus 60 % des directeurs.trices généraux.les soient du même sexe.

3 : Conseil Afrique France ou Europe Demain (CAFED), think do tank

Il s’agit d’un think do tank dont le but est non seulement d’analyser et proposer mais également d’impulser les projets à impacts positifs des deux côtés de la méditerranée. La mission du CAFED est de contribuer à l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD). Cette structure indépendante aura dont pour principaux indicateurs de son plan d’actions les 17 ODD.  

Le CAFED pourra diffuser les meilleures pratiques de développement durable et en même temps mener des analyses approfondies sur des thématiques transversales. Que signifie la raison d’être et la mission pour une entreprise dans le contexte africain par exemple ?

Le CAFED devrait également mener accompagner et/ou réaliser des projets de social-green business à impacts positifs. Il s’agit par exemple d’opérations collectives sur l’économie circulaire territoriale, le bilan carbone et la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la RSE dans les PME et TPE, la Norme ISO 26030 sur la RSE dans la chaîne alimentaire, la féminisation et promotion de l’entreprenariat féminin, etc.

Il pourrait enfin procéder à une analyse critique des initiatives remarques de RSE (Label RSE de la Confédération Générale des Entreprises Marocaines, politique publique de RSE en Tunisie, Investissement Durable au Katanga en République Démocratique du Congo, etc.) et proposer les modalités de déploiement sur d’autres territoires.

Le CAFED publiera également des analyses et outils de référence sur la RSE et ODD (guides, lignes directrices, etc.)

4 : Partenariat Public Privé Diaspora (PPPD), une innovation à explorer

Le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) juge indispensable la contribution du secteur privé pour l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD). Un Partenariat Public Privé (PPP) est donc nécessaire.

Parallèlement depuis plusieurs années, il y a des réflexions sur l’orientation des transferts de fonds de la diaspora africaine, qui sont supérieurs à l’aide publique au développement, vers des investissements plus productifs. La mise en place d’un Partenariat Public Privé Diaspora (PPPD) est une piste sérieuse à explorer. Nous allons prendre un exemple concret pour matérialiser les contours de cette collaboration nouvelle.

Dans une interview à RFI le 25 mai, la Députée Sira SYLLA, Vice-Présidente du Groupe d’études diplomatie économique avec l’Afrique (Nous appelons d’ailleurs l’Assemblée Nationale française à écrire Afrique avec un A majuscule s’il vous plaît) et membre de la majorité présidentielle appelle « à faciliter le soutien des diasporas africaines à l’Afrique ». Avec d’autres parlementaires, elle a saisi le Ministre de l’Economie et des Finances pour une défiscalisation des transferts d’argent vers l’Afrique. Elle suggère la bi-bancarisation (ouverture des banques africaines en France) pour réduire à moyen terme les frais de transferts d’argents. Ils sont effectivement d’environ 9 % selon la Banque Mondiale.

Madame la Députée, nous vous proposons de réfléchir ensemble à la réduction des coûts de transferts tout en orientant une partie de ces fonds vers l’investissement à impacts positifs pour l’atteinte des Objectifs de Développement Durable grâce au PPPD. Le Mobile Money est un véritable succès en Afrique au point où certains africains ne mettront probablement jamais les pieds dans une banque.

L’opérateur de téléphonie Orange et la banque Société Générale, entreprises françaises très implantées en Afrique, sont des acteurs majeurs du Mobile Money en Afrique avec respectivement Orange Money et YUP. L’idée serait de faciliter les transferts d’argents via le mobile, quelque soit l’opérateur, directement de la France vers l’Afrique.

Orange le propose déjà dans l’hexagone mais la prestation reste confinée à certains points de vente dans quelques villes. Egalement les clients de Société Générale et d’autres banques françaises pourraient directement effectuer un transfert de leur compte en France vers le système YUP en Afrique.

Conformément à la cible fixée par les ODD, les frais de ces transferts seraient plafonnés à 3 % TTC. Dans le cadre de leur RSE et de leur mission, on peut naturellement penser que Orange et Société Générale seraient favorables à ce qu’une partie des frais de transferts soit orientée vers un fonds pour financer les entreprises (de la diaspora africaine) à impacts positifs et engagées dans l’atteinte des ODD en Afrique. Ce fonds pourrait être bonifié par la Banque Publique d’Investissement, l’Agence Française de Développement et les entreprises dans le cadre de leur RSE et mission.

La diaspora africaine pourrait et devrait directement investir dans ce fonds. Le transfert d’argent à sa famille c’est bien mais orienter cet argent vers des investissements productifs qui crée la valeur pour soi-même, sa famille, le pays et le continent c’est 1 000 fois mieux.

Pour chacun des 17 Objectifs de Développement Durable, il faudra donc en même temps mettre en exergue les opportunités d’investissement en Afrique et les contours d’un PPPD innovant. Ceci pourrait d’ailleurs être l’une des missions prioritaires du CAFED.

5 : Politiques publiques de RSE et OHADA, leviers de la RSE en Afrique

Suite aux enquêtes réalisées par nos soins, l’absence de politique de publique est le premier frein du déploiement de la RSE en Afrique. Nous accompagnons actuellement le Gouvernement Camerounais dans le processus de co-élaboration avec les parties prenantes d’une législation RSE adaptée au contexte camerounais. La Tunisie a déjà adopté une politique RSE. Le Gabon et la République Démocratique du Congo ont une politique RSE uniquement pour le secteur minier et forestier.

Face au constat que « les états financiers ne permettent pas seuls de comprendre les enjeux de l’entreprise », l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) a adopté en janvier 2017, l’Acte Uniforme relatif au Droit Comptable et à l’Information Financière et le Système Comptable OHADA (SYSCOHADA).

Ce SYSCOHADA révisé est entré en vigueur le 1er janvier 2018 pour les comptes personnels ou sociaux des entités et le 1er janvier 2019 pour les comptes consolidés et combinés (groupes d’entités) ainsi que pour les comptes tenus aux normes internationales d’informations financières (IFRS) des entités cotées et celles qui sollicitent un financement par appel public à l’épargne.

Dans le domaine de la Responsabilité Sociétale des Entreprises, il s’agit d’une véritable révolution pour les 17 Etats membres de l’OHADA à savoir : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Côte d’Ivoire, Congo, Comores, Gabon, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée-Equatoriale, Mali, Niger, République Démocratique du Congo (RDC), Sénégal, Tchad et Togo.

En effet, le SYSCOHADA révisé encadre l’obligation d’information sur la RSE autour de 3 axes :

  • La nature de l’activité fixée dans le cadre conceptuel

De façon spécifique, les entités exerçant une activité économique ayant un impact sur l’environnement (secteur de l’industrie et des mines par exemple) doivent fournir des informations environnementales et sociales.

  • Le niveau des engagements financiers

Toute société ayant un effectif de plus de 500 salariés a l’obligation de fournir des informations sur la manière dont elle prend en compte les conséquences sociales et environnementales de son activité, ainsi que ses engagements sociaux en faveur du développement durable.

  • La liste des informations sociales, environnementales et sociétales à fournir

Cette liste est présentée dans la note 35 qui fait partie des 36 notes annexes intégrées aux états financiers OHADA. La note 35 est obligatoire pour les entités ayant plus de 250 salariés. La liste des informations sociales, environnementales et sociétales à fournir obligatoirement par les entités ayant plus de 250 salariés dans la note 35 est structurée en 3 rubriques et répartie en 13 thèmes et 26 informations.

Mais cette obligation n’est pas encore mise en œuvre sur terrain. Il reste encore des questions essentielles à régler pour que cette exigence RSE de l’OHADA se matérialise et soit définitivement implémentée par les entreprises ciblées.

La France (avec l’Allemagne) pourrait donc en même temps soutenir le processus d’élaboration des politiques publiques en Afrique et la consolidation de l’exigence de reporting RSE de l’OHADA. Deux conditions indispensables au succès du reporting extra-financier en Afrique.

6 : Initiative du couple Franco-Allemand pour l’exemplarité des multinationales en Afrique

Bien évidemment pour l’atteinte des ODD et la réussite de la RSE en Afrique, il faut que tout le monde joue le jeu, y compris les filiales des pays émergents et les entreprises à capitaux africains qui échappent pour l’instant à toute exigence RSE (hormis celles cotées au Maroc et en attendant le respect du reporting RSE de l’OHADA), afin éviter un dumping anti-RSE.

Grâce à l’exemplarité de ses entreprises en Afrique, la France aura une voix forte pour solliciter l’engagement en matière de RSE et féminisation des multinationales présentes en Afrique.

Elle pourra compter sur un allier de poids à savoir l’Allemagne. Portée par la GIZ, la première économie est, d’après nous, le pays qui impulse le plus la RSE et l’économie durable en Afrique aussi bien au Nord qu’au Sud du Sahara.

Le couple Franco-Allemand serait donc très crédible pour porter le message d’un engagement des multinationales auprès des instances européennes et internationales (G7, G20, etc.)

Une initiative Franco-Allemande pour la révision des Principes Directeurs de l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales serait envisageable notamment dans un contexte post COVID-19 où on réfléchit à une nouvelle mondialisation.

La dernière révision des Principes Directeurs a eu lieu en 2011. Il serait donc temps de les évaluer car malgré la mise en place des Points de Contacts Nationaux, il n’y a pas eu l’effet escompté.

De plus, l’Organisation Internationale du Travail (OIT) a revue en 2017 sa Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale avec un paragraphe qui précise que « Les gouvernements devraient élaborer et mettre en œuvre des cadres d’action intégrés afin de faciliter la transition vers l’économie formelle, en tenant compte du fait que les déficits de travail décent sont plus prononcés dans l’économie informelle. Les entreprises multinationales et les autres entreprises devraient elles aussi contribuer à cet objectif. »

Cette mention de l’informelle est très importante car presque toutes les entreprises en Afrique, y compris les multinationales, ont toute ou partie de leur chaîne d’approvisionnement et/ou de distribution dans l’économie informelle. Mais les acteurs de cette économie informelle n’apparaissent nulle part dans leur stratégie ou démarche RSE.

Le Manifeste de Tunis adopté en 2012 lors de la deuxième édition du forum des pionniers de la RSE en Afrique organisée par nos soins et la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie précise «Considérant qu’il y a une réelle imbrication des deux économies formelle et informelle dans un rapport gagnant – gagnant, il importe que dans leur modèle RSE, les entreprises de l’économie formelle prennent en considération la nécessité d’aider les unités informelles au développement de leurs activités de manière à dégager davantage de valeur ajoutée et une répartition plus équitable des revenus dégagés. »

Dans le contexte africain, il est difficile d’avoir une démarche RSE, une raison d’être ou une entreprise à missions crédibles sans en tenir compte.

Le monde de demain c’est en Afrique que ça passe. Pour être partie prenante de cette Afrique Demain, nous joindre par Email : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Thierry TENE, Expert en RSE et économie verte. Editeur du magazine Dirigeantes, management au féminin

Dans son dernier rapport Perspectives Economiques en Afrique publié ce mois, le Fonds Monétaire International (FMI) estime que la croissance moyenne du PIB sera de 3,4 % cette année. En légère hausse par rapport au 2,8 % de l’année dernière. Le FMI l’explique par une croissance mondiale plus forte, les prix élevés des matières premières et un meilleur accès aux marchés de capitaux. Avec un baril qui approche les 80 dollars le baril ce mois, il est fort probable que l’économie africaine maintienne une croissance soutenue cette année. D’autant que les tensions géopolitiques actuelles vont certainement contribuer à l’augmentation des cours du pétrole qui entraînera dans son sillage l’ensemble des autres matières premières. Malgré l’accélération de la tertiarisation de l’économie, observée en Afrique depuis quelques années, l’économie brune qui dépend des ressources fossiles reste encore la principale contributrice au PIB. Elle présente aussi l’inconvénient d’être peu créatrice d’emplois. Et qu’en sera-t-il demain dans un contexte mondial de réduction de gaz à effet marqué par l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris et un mouvement de désinvestissement sur les ressources fossiles? Selon le rapport Emploi et questions sociales dans le mondiale 2018 : Une économie verte et créatrice d’emploi, publié le 15 mai, l’Organisation Internationale du Travail (OIT) estime que la limitation du changement climatique à 2°C va entraîner la suppression de 6 millions d’emplois dans le monde. L’OIT envisage par ailleurs la création de 24 millions d’emplois à l’horizon 2030 si les politiques de promotion d’une économie plus respectueuse de l’environnement sont mises en œuvre. En faisant le ratio entre destruction et création d’emplois, l’écologisation progressive de l’économie mondiale permettra donc un gain de 18 millions d’emplois. A cause de leur forte dépendance aux énergies fossiles et aux mines, l’Afrique et le Moyen-Orient connaîtront des pertes nettes d’emplois alors que 3 millions seront crées en Amériques, 14 millions en Asie et pacifique et 2 millions en Europe grâce aux mesures prises en matière de production et de consommation d’énergie. Il est donc urgent pour l’Afrique de décarboner son économie, d’impulser une économie verte inclusive et de définir des portefeuilles de projets de green business. Les autorités doivent adopter des politiques publiques ambitieuses pour assurer une croissance verte en mettant l’accent sur la valorisation des déchets et l’économie circulaire, l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, les transports alternatives, l’éco-tourisme, la gestion durable des forêts, l’agriculture biologique et durable, la valorisation économique des écosystèmes et l’éco-construction. En synergie avec l’Etat, le secteur privé doit également saisir les opportunités de social-green business, de création d’éco-entreprises et de verdissement des emplois actuels. Thierry TENE, Associé et Directeur de Afrique RSE
Parmi les politiques d’accompagnement et de promotion du secteur privé évoqué dans le deuxième Recensement Général des Entreprises publié en début d’année, l’Institut National de la Statistique du Cameroun propose d’élaborer et mettre en œuvre un plan de formation des chefs d’entreprises à la Responsabilité Sociétale de l’Entreprise (RSE). Cette proposition est en phase avec les attentes en matière de RSE évoquées par les participants à la première session de la plateforme de dialogue des parties prenantes sur la RSE au Cameroun qui a eu lieu à Yaoundé en juillet 2017. En effet, les structures parapubliques ont mentionné la vulgarisation et la formation en matière de RSE tandis que le secteur privé a fait part d’un besoin en sensibilisation et formation sur la RSE. Par ailleurs, les écoles et universités sont en attente de formation des formateurs sur la RSE. Du côté des syndicats, ONG et associations, le renforcement des capacités de la société civile et la sensibilisation sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises est vivement souhaitée. Dans le cadre des consultations en cours sur les politiques publiques de RSE au Cameroun la majorité des patrons des patrons que nous rencontrons, insiste sur la nécessité de sensibiliser les dirigeants sur la RSE en démontrant les avantages d’une démarche de responsabilité sociétale pour les entreprises. La formation sur la Norme ISO 26000 et le déploiement de la RSE dans le contexte africain que nous organisons le 26 et 27 juillet 2018 à Douala au Cameroun insistera particulièrement sur les bénéfices de la responsabilité sociétale pour les organisations africaines. Au-delà du Cameroun, le renforcement des capacités des parties prenantes sur la RSE est l’une des conditions indispensables de son déploiement en Afrique. En effet, en amont de la première édition du forum international des pionniers de la RSE en Afrique qui a eu lieu à Douala en 2011 en partenariat avec le Groupement Inter-Patronal du Cameroun (GICAM), nous avons réalisé une enquête auprès des cadres et dirigeants africains sur les freins principaux à la mise en œuvre de la RSE en Afrique. Le résultat donnait le tiercé dans l’ordre suivant : l’absence de politiques publiques de RSE, le manque de formation et de compétences et l’absence de valorisation des entreprises « responsables ». C’est donc logiquement que le Manifeste de Douala sur la RSE en Afrique adopté le 10 novembre 2011 recommande la formation des dirigeants, décideurs et cadres des Gouvernements, des collectivités territoriales et des entreprises à la RSE. Face à ce constat, nous avons d’ailleurs animé à Tunis deux jours de formation sur la RSE avant la deuxième édition du forum des pionniers de la RSE qui a eu lieu en 2012 en Tunisie en partenariat avec la Confédération des Entreprises Citoyens de Tunisie (CONECT). Thierry TENE, Associé et Directeur de Afrique RSE
D’après le deuxième Recensement Général des Entreprises publié en début d’année par l’Institut National de la Statistique, le Cameroun compte 209 482 unités économiques en activité et exerçant dans un local professionnel fixe, reparties en 203 419 entreprises sièges et 6 063 établissements. Le tissu productif est caractérisé par la prédominance des Très Petites Entreprises (TPE) et Petites Entreprises (PE) qui représentent 98,5 % de l’ensemble des entreprises. Les Moyennes Entreprises (ME) et les Grandes Entreprises (GE) représentent respectivement 1,3 % et 0,2 %. C’est la raison pour laquelle dans le cadre des politiques publiques relatives à l’amélioration de la compétitivité de l’économie camerounaise, le Premier Ministre Chef du Gouvernement a instruit au Ministre des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Economie Sociale et de l’Artisanat (MINPMEESA) de coordonner le processus d’élaboration du cadre législatif portant sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) au Cameroun. Pour relever cet important challenge, le MINPMEESA a mis en place un processus innovant et inédit pour l’élaboration d’une politique publique. Il s’agit de la plateforme nationale de dialogue des parties prenantes sur la RSE dont l’objectif est la mobilisation de l’ensemble des parties prenantes (secteur public, secteur privé, PME, syndicats, ONG, associations, universitaires, etc.) pour la co-élaboration par les camerounais et pour le Cameroun d’une politique publique de RSE adaptée aux PME et au contexte camerounais. Lors de la première session de la plateforme qui a eu lieu à Yaoundé le 26 juillet 2017, près de 200 participants (administrations, structures parapubliques, secteur privé, écoles et universités, syndicats, ONG et associations) ont identifié les forces et faiblesses de chaque composante des parties prenantes par rapport à la mise en œuvre d’une politique publique de RSE au Cameroun ainsi que les freins opérationnels au développement de la RSE au Cameroun et les leviers de mobilisation des entreprises de toute taille pour la mise en œuvre de la RSE dans le contexte camerounais. En prélude de la deuxième session, le cabinet Afrique RSE a élaboré un projet de politiques publiques de RSE au Cameroun. Le MINPMEESA a retenu une cinquantaine d’organisations patronales et de syndicats d’employeurs qui seront consultés par nos soins pendant les mois de juin et juillet 2018. A l’issue de ce processus, le projet de politique publique de RSE au Cameroun devrait tenir compte des attentes du secteur privé camerounais. Ce document servira de support de discussion lors de la deuxième session de la plateforme de dialogue des parties prenantes sur la politique publique de RSE au Cameroun. Thierry TENE, Associé et Directeur de Afrique RSE

Katanga, RDC : Institut Afrique RSE réalise le guide RSE des entreprises minières

Lire l'article